Pouvez-vous vous présenter et nous en dire plus sur votre parcours ?
Je m’appelle Jeanne Marchive, j’ai 27 ans et je suis originaire de Niort. Lorsque j’ai eu 20 ans je me suis installée à Paris où j’ai intégré l’ISCOM. En regardant l’émission Habillées Pour… de mademoiselle Agnes et Loic Prigent j’ai découvert Chanel, la plus puissante maison pour moi, en terme d’image, de symbolique, et d’histoire. Je suis devenue habilleuse pour pouvoir toucher une veste en tweed lors de mon premier défilé ou tenir une robe qui a demandé 198 heures de travail. J’ai pris alors conscience de la valeur du savoir-faire artisanal.
J’ai travaillé dans différentes maisons, notamment chez Chloé en production image, chez Chanel dans le secteur de la beauté et de la presse internationale puis chez Hermès au lancement de la beauté. Enfin, j’ai créé ma propre marque et depuis deux mois, je suis chargée de production image dans ma maison de coeur Chanel.
Comment est née l’idée de créer une marque ?
J’ai réalisé que plus de 80% de mes vêtements provenaient d’Asie, j’ai fait une analyse du marché pour trouver des marques qui correspondaient à mon style, mon pouvoir d’achat et qui se rapprochaient de mes valeurs à savoir le Made in France, la traçabilité des produits et les conditions de travail dans les ateliers. J’ai longtemps cherché et Marjanne est arrivée pour répondre à toutes ces attentes.
Pourquoi Marjanne ?
C’est mon surnom, un mix de mon prénom et mon nom. Il y a aussi une référence plus personnelle à Marjanne Strapie, une femme forte et ambitieuse qui m’inspire beaucoup. Le dépôt du nom fut compliqué à la suite d’une mise en demeure. J’avais adopté Marjanne, c’était une évidence et je comptais bien me battre pour la garder.
Comment se positionner sur un marché aussi concurrentiel ?
Lorsque j’ai questionné les personnes autour de moi, j’ai compris que Marjanne répondait à leurs besoins et qu’il y avait une réelle place à prendre, j’ai donc saisi cette opportunité.
Par quoi commence-t-on pour créer seule son entreprise ?
Je me suis rapprochée d’une directrice image de chez Chanel, elle m’a présenté Loreleï, ma styliste actuelle, qui a tout de suite comprit ma vision du projet. J’ai créé ensuite un business plan en identifiant ma cible, ma concurrence et en établissant mon positionnement prix. En août 2021, j’ai déposé ma marque et créé ma société par l’INPI et ma première collection était lancée en mars 2021.
Comment avez-vous trouvé vos fournisseurs et vos modélistes ?
J’ai trouvé mes tissus et boutons sur le site du référencement des artisans du patrimoine français. Pour le chaine et trame, j’ai regardé les ateliers de mes concurrentes. J’ai changé trois fois de modélistes, le rapport qualité passe en premier, je porte au quotidien mes pièces pour faire mes propres reportings.
Quelles sont les étapes de la confection d’une pièce ?
J’envoie mes inspirations à ma styliste qui me présente des croquis et un plan de collection. Elle met ensuite en place un dossier technique pour la modéliste qui réalise des patrons et modélise le vêtement en 3D. Puis plusieurs prototypes sont réalisés en apportant des modifications stylistiques et techniques, une fois validé, on peut lancer la production.
Comment avez-vous réussi à financer un tel projet ?
J’avais 21 000 €, mais je suis arrivée vite au bout. J’ai lancé une campagne Ulule, un site de crowdfunding Français, en fixant un objectif de 100 pièces. J’ai récolté 10 000 € (moins la commission d’Ulule) et réalisé un chiffre d’affaires de 11 000 €. J’étais en déficit, mais ça m’a permis d’avoir une place au salon who’s next, l’occasion d’être visible et d’établir des liens.
France Active a financer ma deuxième collection à hauteur de 60 000 € et a couvert 48 000 € en cas d’échecs. 90% de mon temps est dans la production, mettre de côté la communication par manque de budget et de temps est frustrant, d’autant plus quand on travaille dans un métier d’image.
Comment faites-vous pour donner du temps à Chanel et Marjanne ?
Pour le moment je prends mes marques sur ce nouveau poste. Le lancement de Marjanne était très intensif et ce retour est une bouffée d’oxygène et m’a permis de prendre du recul.
C’est une nouvelle source d’inspiration, ainsi qu’une stabilité financière. Grâce à Marjanne j’ai acquis énormément de compétences autant sur le plan professionnel que personnel. Au lancement je ne voyais qu’une partie de l’iceberg, sans mesurer la difficulté. Les choses se passent rarement comme prévu, alors il faut trouver des solutions, apprendre à s’écouter et se faire confiance.
Après tout l’investissement que j’ai mis dans ce projet, j’ai eu une grosse culpabilité, mais les bons retours de mes clients, les retours de la presse et la collaboration avec les influenceurs m’ont donné confiance.
Aujourd’hui je suis à la recherche d’un financement pour développer ma prochaine collection et j’ai hâte de retrouver Marjanne.